samedi 28 novembre 2009

Prix : les meilleurs romans policiers 2009 en Suède

La Svenska deckarakademin a distingué trois romans policiers pour 2009 (voir la liste des nominations dans ce précédent billet).


Tre sekunder (Trois secondes) d'Anders Roslund & Börge Hellström aux éditions Piratförlaget emporte le titre du meilleur polar suédois de l'année. C'est le cinquième roman du duo Roslund/Hellström.

Trois secondes, c'est le temps qu'il faut pour mourir. Il s'agit d'un thriller haletant (dixit les critiques), l'histoire d'un ancien petit voyou retourné par la police et infiltré dans la mafia. L'agent double grimpe les échelons mais les événements dérapent et il se retrouve dans une prison de haute sécurité, à la merci de ses codétenus.

Les lecteurs francophones peuvent déjà lire le premier polar de Roslund et Hellström, traduit par Lucile Claus et Maximilien Stadler aux Presses de la Cité: La bête.




Le prix "Martin Beck" du meilleur polar traduit en suédois en 2009 a été attribué à Andrew Taylor pour Det blödande hjärtat ("Bleeding Heart Square"). La traduction suédoise est éditée par Forum. Mise à jour: je l'ai lu en VO dans l'édition Penguin (voir billet).







Enfin, un prix du meilleur premier roman policier a été décerné cette année. Il récompense Det som ska sonas (Ce qui doit être expié) d'Olle Lönnaeus, édité chez Damm Förlag.

Olle Lönnaeus est journaliste au Sydsvenskan. Il était en déplacement à Londres ce week-end lorsqu'il a appris la nouvelle grâce au coup de fil d'un membre de la Deckarakademi.

Son roman se déroule en Scanie, dans le sud de la Suède, à Tomelilla (un peu au nord d'Ystad, ville du célèbre commissaire Kurt Wallander). Un journaliste à la dérive -Konrad Jonsson- apprend le meurtre de ses parents adoptifs. Ce sera l'occasion pour lui de retourner en Scanie, se plonger dans les mystères de son enfance, s'interroger sur la disparition de sa mère (Agnes, originaire de Pologne) lorsqu'il avait sept ans, cette mère dont il était interdit de parler à la maison. Il découvrira de vieux secrets protégés par un épais mur de silence.

Je sens qu'il va se retrouver dans ma liste d'achats prévue pour le printemps... Mise à jour: je n'ai pas attendu le printemps: voir le billet de lecture.


Sources : Dagens Nyheter, Blekinge Läns Tidning.
Source photos : Bokia.

mercredi 25 novembre 2009

Le Nord en photos

Soie (dit en passant) consacre un petit blog a ses photos de vacances en Norvège et Suède.

Autour de Soie - Photos amateur

De belles images, qui accompagnent très bien la lecture d'un polar scandinave (de telles photos sont parfaites pour agrémenter la lecture du Thomas Kanger par exemple). Nostalgie assurée pour ceux qui connaissent un peu la Scandinavie.

Voir aussi son billet Bleu scandinave.

On peut cliquer sur les images pour les agrandir.

Bravo et merci pour le dépaysement!

dimanche 22 novembre 2009

La princesse du Burundi: pêche en eaux troubles

La princesse du Burundi de Kjell Eriksson, Éd. Gaïa, traduction Philippe Bouquet. C'est le troisième roman mettant en scène Ann Lindell. Les deux premiers sont également publiés chez Gaïa et s'intitulent La terre peut bien se fissurer et Cercueil de pierre.

Si vous aimez vos polars aussi noirs que votre café matinal, voilà un roman qui devrait retenir votre attention.

* * *

Peu de temps avant Noël, le corps de John Jonsson alias Petit-John est retrouvé dans une décharge à neige au sein d'une zone industrielle de la ville d'Uppsala.

Issu d'une famille de travailleurs (son père était couvreur) John était connu pour son passé de petit délinquant mais s'était rangé des voitures depuis plusieurs années et vivait avec sa femme Berit et leur fils adolescent Justus. Il avait travaillé comme soudeur (le meilleur selon ses anciens collègues) mais était depuis quelques mois au chômage.

Il avait même acquis une réputation dans le milieu des aquariophiles. Petit-John avait installé chez lui un grand aquarium où il élevait des poissons importés d'Afrique, dont des Princesses du Burundi.

Qui a pu vouloir le torturer et l'assassiner? Et surtout pourquoi? Pour le voler? Il vivait sur la corde raide et consacrait tout ce qu'il pouvait gagner à sa famille et à son bel aquarium. Pour se venger? Calme et réservé, il n'était pas du genre à susciter la haine.

Les enquêteurs vont avoir fort à faire pour démêler l'intrigue. Lennart, le frère de la victime, a bien l'intention de retrouver l'assassin avant eux.
«La famille Jonsson était de celles qui avaient peuplé ce quartier et elle avait eu plus que son lot de malheurs. Trois d'entre ses membres avaient trouvé la mort. La fille, le père, et maintenant le fils. Un accident, un suicide supposé et un meurtre. Comme si toutes les formes de mort violente de cette rue et du quartier s'étaient acharnées sur cette famille.»
* * *

Le cadre

Uppsala est une ville universitaire (l'université a été fondée en 1477 et est la plus ancienne de Scandinavie) située à environ 70 km au nord de Stockholm. La ville a été fréquentée par plusieurs célébrités dont Carl von Linné. Le jardin botanique de Linné a été reconstitué et est amoureusement entretenu.

Nombreuses photos de la ville sur le site Uppsalafoto. Pour vous aider dans les catégories: vinter = hiver, höst = automne, sommar = été, vår = printemps. Gamla Uppsala = le vieil Uppsala.

Kjell Eriksson entraîne ses lecteurs bien loin de ces jolies images. Pas de magie de Noël dans ce roman. La neige recouvre parfois bien des couches de crasse.
«Pour l'instant il se sentait parfaitement sobre, affûté comme jamais auparavant, et observait son quartier en train de se couvrir d'un linceul blanc. En entendant crisser ses pas, il aurait voulu dévorer non seulement ce bruit mais encore la ville entière, tout ce fichu bazar, faire place nette.»
* * *

Les humains

Je n'ai pas lu les deux premiers romans de la série, mais cela ne m'a nullement posé problème pour comprendre les relations entre les policiers qui enquêtent sur l'affaire.

Ann Lindell est un peu à l'écart pour cause de congé maternité et est remplacée à la tête de l'équipe par un collègue qu'elle connaît bien et apprécie, Ola Haver. Elle s'ennuie toutefois dans son rôle de mère célibataire et ne peut s'empêcher de s'immiscer dans l'enquête. Étrangement, Haver ne s'en offusque pas (il est plutôt du genre bonne pâte).

L'univers d'Eriksson se veut réaliste. Il met particulièrement l'accent sur les difficultés de communication des êtres humains. Plus étroit le lien, plus difficile semble la communication. Cela vaut aussi bien pour les policiers (Ola a de sérieux problèmes de couple; Ann n'a tout simplement plus de vie de couple et s'intéresse plus à son boulot qu'à son bébé de neuf mois) que pour les proches de la victime. Lennart, le frère aîné délinquant et alcoolique, traverse le roman sans parvenir à se rapprocher de sa belle-sœur; celle-ci a de son côté bien des difficultés à communiquer avec son propre fils, Justus.

Se parler sans se comprendre. Proches mais solitaires. Eriksson élargit ce constat à l'ensemble de la société moderne, où règnent l'argent et le chacun-pour-soi.

Les réunions quotidiennes du groupe d'enquêteurs donnent parfois lieu à des épanchements amers. Le rôle de la police dans la société ou des détails plus prosaïques comme les coupures dans les budgets sont discutés à certaines occasions. Comme chez Arne Dahl, il se dégage une certaine nostalgie pour un passé disparu à jamais.
«Je commence à avoir de plus en plus de doutes sur le choix que j'ai opéré. Je ferais peut-être mieux de devenir entraîneur de boxe ou quelque chose comme ça.»
En toile de fond nous avons Uppsala et les fiévreux préparatifs de Noël. Le contraste est d'autant plus saisissant.

Une histoire amère.

Addenda: SériaLecteur (bon pseudo!) a repéré un détail -qui ne pouvait que m'échapper- à propos des Princesses du Burundi. Certains se mangent et d'autres sont jolis, voilà à peu près toutes mes connaissances en matière de poiscaille.

* * *

L'auteur

Jardinier et auteur, Kjell Eriksson vit à Uppsala.

La série policière "Ann Lindell" compte dix titres. Trois ont été traduits:

Den upplysta stigen, 1999 (prix du meilleur premier polar 1999, Svenska Deckarakademin)
Jorden må rämna, 2000 (La terre peut bien se fissurer)
Stenkistan, 2001 (Cercueil de pierre)
Prinsessan av Burundi, 2002 (La princesse du Burundi)
Nattskärran, 2003
Nattens grymma stjärnor, 2004
Mannen från bergen, 2005
Den hand som skälver, 2007
Svarta lögner, rött blod, 2008
Öppen Grav, 2009

Eriksson a décidé de mettre un terme à la série cette année, avec Öppen Grav. Ann Lindell a vieilli, lui aussi. "Notre histoire est terminée. Après dix ans et nombre de romans policiers. Pourtant je suis curieux et me demande où elle va." Il la regarde traverser la voie ferrée et partir, peut-être vers le commissariat de police...

"Notre ville. Uppsala. Crise économique, chômage, ségrégation, les jeunes de Stenhagen et Gottsunda qui mettent le feu aux voitures et lancent des pierres sur les policiers, écoles et centres de soins privatisés."

Les Suédois disent donc bye bye et adjö à Ann Lindell cette année, mais les lecteurs francophones devraient avoir quelques années de lecture en sa compagnie, si Gaïa poursuit les traductions!

mercredi 18 novembre 2009

Kof kof kof

Novembre. L'arrivée de l'hiver. Chouette.

En ces temps de bronchite, rhume, et bien évidemment grippe, voici une petite recette bien utile avant le coucher (mais ça marche aussi le matin). Ajoutez à votre thé ou tisane habituelle le jus d'un citron et un peu de gingembre frais haché finement ou écrasé. Allez-y doucement sur le gingembre la première fois, quitte à en rajouter un peu ensuite.

Ça ne remplace pas les pilules mais ça requinque.

mercredi 11 novembre 2009

Olycksfågeln - L'Oiseau de mauvais augure

Olycksfågeln, Éd. Forum, 2006 - à paraître en français chez Actes Sud. Si l'éditeur maintient le même rythme que pour les trois premiers titres la version française devrait être disponible d'ici mai ou juin 2010.

Mise à jour avril 2010: eh bien mon petit calcul s'avère exact puisque le bouquin est annoncé pour le 5 mai en France, soit probablement début juin au Québec. Le titre sera L'Oiseau de mauvais augure.

* * *

Le quatrième roman de Camilla Läckberg, Olycksfågeln, commence par un accident de la route qui coûte la vie à Marit Kaspersen, une commerçante de la localité... mais est-ce bien un accident? Cette question va occuper les policiers du commissariat de Tanumshede (1) au début du bouquin.

Contrairement aux précédents romans de la série, l'enquête démarre lentement. Ce n'est pas très grave car il se passe malgré tout bien des choses et de nombreux personnages doivent être présentés.

L'accident initial tout d'abord, qui a des conséquences sur les proches de Marit Kaspersen: sa compagne Kerstin avec laquelle Marit vivait "dans le placard" depuis quelques années; son ex-mari Ola qui n'a pas toujours bien accepté son nouveau mode de vie; et Sofie, la fille qu'elle a eue avec ce dernier.

L'histoire débute également avec l'arrivée d'une nouvelle recrue au commissariat. Hanna Kruse se joint aux enquêteurs et plonge tout de suite dans l'action. Ambitieuse, elle compte bien saisir l'occasion pour mériter sa place au sein du groupe.

Pendant ce temps une émission de "télé-réalité" -sorte de Loft Story alcoolisé- installe ses caméras dans une maison à Tanumshede. Six jeunes vont y vivre et se mêler à la petite communauté, sous les yeux avides des caméras. Aux commandes de Fucking Tanum (c'est le nom de l'émission) se trouve un producteur cynique, Fredrik Rehn, qui a un allié dans la place en la personne du kommunalråd (une sorte de maire, élu par le conseil municipal), Erling W Larson. Ces deux personnages sont assez caricaturaux (Erling ressemble à l'antipathique maire des Dents de la Mer, ça ne nous rajeunit pas).

Les six jeunes avides de célébrité sont, eux, plus intéressants. Il y a Uffe, l'abruti musclé qui cache son insécurité sous une épaisse couche de fanfaronnades; Lillemor, la fausse blonde qui préfère qu'on l'appelle Barbie et qui mise beaucoup sur son physique pour avancer dans la vie; Jonna, qui souffre d'avoir deux parents indifférents et se taillade régulièrement les avant-bras pour exorciser son mal-être; Mehmet, qui a conscience d'avoir déçu ses parents et cherche son propre chemin; Calle, le fils à papa qui passe le plus clair de son temps à claquer l'argent du paternel dans les bars branchés de Stockholm; Tina, qui voit dans l'émission un tremplin vers son rêve de toujours, devenir chanteuse.

Enfin il y a les joies et les peines de la petite famille que nous connaissons bien désormais: le policier Patrik Hedström et sa compagne Erica Falck, leur fille Maja qui ne parle pas encore mais sait très bien se déplacer à quatre pattes. À ce trio s'ajoutent Anna et ses deux enfants, Adrian et Emma. La raison de la présence d'Anna se trouve dans le roman précédent, le Tailleur de pierre.

La maisonnée est saisie d'une agitation frénétique, mais je vous laisse découvrir pourquoi.

La foudre va soudain tomber sur la "pas-si-paisible" localité: l'éboueur de Tanumshede (2) découvre un corps dans un container à ordures.

Les révélations -et les cadavres- vont dès lors se succéder.

* * *

Le quatrième roman de Camilla Läckberg a les qualités et les défauts des précédents.

Parmi les défauts je range quelques invraisemblances. J'ai ainsi beaucoup de mal à croire qu'une promenade au bord de la mer suffise pour mettre fin à six mois de dépression. Par ailleurs, bien que ne connaissant pas le niveau de professionnalisme des policiers suédois, je trouve surprenant qu'ils puissent parfois laisser échapper d'importants indices, laissant le soin à Patrik Hedström de les découvrir.

Ces menus défauts n'empêcheront pas le lecteur de se plonger avec plaisir dans l'intrigue. On peut s'amuser à essayer de deviner l'identité du tueur, ou du moins ses motivations. À certains moments vous vous surprendrez à vouloir souffler des idées à Patrik.

La fin réserve une petite surprise qui sera explorée -et sans doute éclaircie- dans le cinquième volume, Tyskungen.


À propos du titre. Le mot olycksfågel désigne un "porte-poisse" (3). Pensez au personnage de Pierre Richard dans le film La chèvre si vous voulez un exemple quelque peu extrême. Un olycksfågel provoque toute sorte de désastres, petits ou grands. Celui du roman apparaît dans quelques courtes scènes. Qui est-il? Pourquoi est-il surnommé ainsi? Comment est-il lié à l'intrigue? C'est un des mystères de ce roman, aussi divertissant que les précédents.


---NOTES---
(1) Tanumshede et Fjällbacka sont deux petites localités appartenant à la même commune, voir Meurtres sur la côte ouest.

(2) L'éboueur, Leif, est un cas très particulier. Contrairement aux autres personnages du roman il existe vraiment.


(3) "Oiseau de malheur" conviendrait bien, je pense. Actes Sud a opté pour "Oiseau de mauvais augure".

[Participe au challenge Lire en VO]


mercredi 4 novembre 2009

Nominations suédoises - cuvée 2009

La Svenska Deckarakademin a dévoilé la liste des nominations 2009 (cliquez sur les titres pour avoir plus d'informations sur les sites des auteurs ou des éditeurs).

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Sont en compétition pour le prix du meilleur roman policier suédois 2009 (l'éditeur figure entre parenthèses)

Ingrid Hedström: Flickorna i Villette (Alfabeta) voir ici pour le billet de lecture

Tove Klackenberg: Dömd på förhand (Alfabeta)

Håkan Nesser: Maskarna på Carmine Street (Albert Bonniers förlag)

Anders Roslund & Börge Hellström: Tre sekunder (Piratförlaget)

Veronica von Schenck: Kretsen (Ordfront)

Le site de l'Académie rappelle que Håkan Nesser a déjà remporté trois fois ce prix (en 1994, 1996 et 2007), sans oublier son "debutpris" (qui récompense le meilleur premier roman) en 1993.

Quelques romans de Nesser ont été traduit en français chez Seuil : Retour à la Grande Ombre, Le mur du silence, Funestes carambolages.

Roslund & Hellström sont les auteurs de La bête, traduit en français aux Presses de la Cité.

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Sont en compétition pour le prix "Martin Beck" (meilleur roman policier traduit en suédois - le titre original est en vert)

Gianrico Carofiglio: På sannolika skäl (”Testimone inconsapevole”)

Guillermo Martínez: Lucianas långsamma död (”La muerte lenta de Luciana B”)

Deon Meyer: Jägarens hjärta (”Heart of the Hunter”)

Denise Mina: I midnattens stillhet (”Still midnight”)

Andrew Taylor:Det blödande hjärtat (”Bleeding Heart Square”, voir le billet de lecture)


La Svenska Deckarakademin fera a fait connaître ses choix le 28 novembre.

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PS: on me souffle à l'oreille qu'il y aurait eu également des prix littéraires décernés en France. Le bon court, le dos de Renaud, le prix Borgia... des choses comme ça. Je n'ai pas bien saisi il y avait de la friture sur la ligne.

Bon, je plaisante un peu ;-) Félicitations à Dany Laferrière.

lundi 2 novembre 2009

Le Tailleur de pierre : des âmes brisées

L'histoire du Tailleur de pierre commence par une découverte macabre: un pêcheur de homards trouve le corps d'une fillette, Sara. Elle est morte noyée mais le médecin légiste réalise très vite que les poumons contiennent de l'eau douce, et non pas de l'eau de mer.

Fjällbacka est une toute petite ville et Erica connaît la famille de la victime. Charlotte, la mère de la jeune victime, est une amie. Erica aura ainsi l'occasion de donner un petit coup de main à son policier d'époux.

Läckberg explore ici un thème que l'on retrouvait déjà dans les deux premiers romans: le mal a des racines profondes, et il est contagieux. Le lecteur aura donc l'occasion de découvrir, en pointillés, des événements vieux de plusieurs décennies.

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Ce troisième roman de Camilla Läckberg plaira beaucoup à ceux qui ont apprécié les deux premiers. On retrouve en effet dans Le Tailleur de pierre tout ce qui fait le charme de son petit univers.

À commencer par le couple Patrik Hedström & Erica Falck, auquel s'ajoute désormais Maja (1). Le bout de chou ne parle pas encore -sa principale activité consiste à s'alimenter- mais elle pleure et "chougne" souvent, ce qui épuise l'heureuse maman qui avait une autre vision du métier de mère! Dédaigneuse des conseils de son envahissante belle-mère Erica trouvera dans un livre (2) le truc pour habituer le petit monstre à dormir dans son landau et non plus uniquement dans les bras de sa maman...

Le commissariat de Tanumshede est très présent dans ce roman aussi, mais comme il s'agit d'un Läckberg il sera souvent question des relations (parfois bonnes, parfois mauvaises) entre Patrik, Martin, Ernst, Gösta, sans oublier le suffisant commissaire Mellberg et la perspicace secrétaire Annika.

Ce troisième roman de la série contient son lot de surprises et de coups de théâtre. La vie de plusieurs personnages récurrents va connaître d'importants changements. Pour ne pas tuer le suspense (un meurtre suffit!) je ne donnerais qu'un exemple: le jeune enquêteur, Martin, emménage avec sa dulcinée dès le début du roman. On s'y attendait à la fin du Prédicateur mais maintenant ça devient sérieux.

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Ce que j'ai moins aimé: certains coups de théâtre sont justement... un peu trop théâtraux.

Ce que j'ai aimé:

Le travail sur les personnages. C'est LE point fort de Camilla Läckberg. Visiblement curieuse de la nature humaine, elle pétrit ses personnages, les façonne, leur donne du relief... quitte à les trucider sans pitié dans le court du récit. Malgré la présence de quelques clichés ici ou là (par exemple la belle-mère, perpétuelle donneuse de leçons) on prend plaisir à explorer cette galerie de portraits. L'auteure nous fait entrer dans la tête des protagonistes, y compris bien sûr dans celle du tueur.

Une belle idée: dans le Tailleur de pierre un des personnages, Morgan, souffre du syndrome d'Asperger. Pour plus d'information on pourra se référer aux associations qui ont un site Internet, comme Autisme Montréal.

Une connaissance préalable de ce syndrome n'est absolument pas nécessaire pour suivre l'histoire: Läckberg prend prétexte de l'ignorance des enquêteurs pour donner les informations "de base" nécessaires à ses lecteurs (elle envoie le brave Martin s'informer auprès d'une psychologue, ce qui s'avère bien utile).

L'intrigue. Elle est suffisamment complexe pour entretenir l'intérêt du lecteur tout au long des 475 pages du roman. Plusieurs récits s'entrecroisent (dont celui concernant le fameux tailleur de pierre) et ce n'est qu'en approchant de la fin du roman qu'ils se rejoignent et que les mystères se résolvent.

Les petites choses qui sentent bon la Suède. Par exemple lorsque Patrik, pris d'une petite faim, sort du frigo un tube de kaviar, du fromage, et se fait des tartines. Ah, le kaviar! Ça mérite un billet, tiens.

Puisqu'on parle de bouffe... je note que c'en est fini des gueuletons que Patrik et Erica se préparaient dans la Princesse des glaces. Ils ont atteint ce stade où ils n'ont plus besoin de s'éblouir mutuellement avec des recettes audacieuses. Le tube de kaviar a désormais sa place dans la cuisine des tourtereaux!

Petit conseil à ceux qui ne connaissent pas encore les romans de Camilla Läckberg: il vaut mieux lire au moins Le prédicateur avant de se plonger dans Le tailleur de pierre. Ce n'est pas absolument indispensable mais cela permet de mieux comprendre ce qui se passe entre Anna et Lucas ou la raison des tensions entre Patrik et Ernst, etc.


---NOTES---
(1) se prononce "Maya".

(2) Le livre existe: il s'agit de Barnaboken par Anna Wahlgren.

Le kaviar : trésor culinaire suédois

(photo Lars Dareberg, Sydsvenskan)

Nous apprenons dans le Tailleur de pierre que Patrik Hedström, policier à Tanumshede, aime bien se faire des tartines de kaviar.

Non, le salaire des policiers suédois ne leur permet pas de se gaver d'œufs de béluga! Le mot kaviar désigne le plus souvent une pâte à base d'œufs de morue - elle se présente en tubes et ne coûte pas très cher.

Lorsqu'un Français entre pour la première fois dans une "épicerie" québécoise il remarque tout de suite le mur de fromages cheddar: en blocs de diverses tailles ou sous forme de pâte à tartiner, le cheddar est partout. Exotisme garanti.

Un visiteur en Suède sera plutôt intrigué par les produits à base de poissons (surtout du hareng) séché ou mariné dans des sauces très variées, et par le fameux kaviar.

Le kaviar appelle la tranche de pain comme la sirène appelle le marin! L'absence de pain n'arrêtera toutefois pas le vrai fan de kaviar qui n'hésitera pas à téter le tube pour assouvir sa passion...

Ah! Si seulement nos libraires offraient un tube de kaviar gratuit pour tout polar suédois acheté. Ça stimulerait les ventes, je vous le garantis.

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Addenda: Soie mentionne en commentaire une spécialité sucrée, les kanelbullar (brioches à la cannelle). Sweden.se leur consacre une petite page, recette à l'appui. Le site propose tout un choix de plats typiques, dont la délicieuse "tentation de Jansson".